COURLAOUX, UN VILLAGE AU PASSÉ HISTORIQUE

Notre commune a une histoire très ancienne. Elle se trouve située sur l'ancienne voie romaine de Lons-le-Saunier à Tournus, à la limite de la Bourgogne et de la Franche-Comté. La proximité des sources salées de Lons et de Montmorot la fait se trouver sur le passage de la route du sel en direction de la plaine fertile de la Saône.

Au XIIIe siècle, Courlaoux était une terre dépendant des vastes domaines de la maison de Vienne. Elle était, en 1282, dans la mouvance de Jean de Chalon-Arlay Ier qui, à la suite d'un traité de famille, en fit hommage à son frère Etienne de Chalon. A cette époque, il existait une famille noble du nom de Corlavour à qui avait été inféodée la prévôté de ce lieu et qui tenait cette terre. En 1385, Isabelle de Corlavour vendit à Jean de Chalon-Arlay III, prince d'Orange, ses droits sur les terres et seigneuries de Courlaoux. Jean de Vaudrey reprit de ce prince la Maison Forte de Corlavour. C'est ainsi que les Vaudrey prirent la place des Corlavour dans cette seigneurie. L'étendue des vestiges de la motte féodale témoigne de l'importance du château et du village à cette époque.

Le château était une des principales clés du bailliage d'Aval. Il joua un rôle important pendant tout le cours du Moyen-Age. Les seigneurs, qui le possédaient, l'habitaient très souvent. Mais pendant les guerres de conquête de la Franche-Comté, il devint l'objet de luttes incessantes, tantôt occupé par les Français, tantôt par les Comtois.

En 1673, le capitaine Prost, dit Lacuzon, chef des Comtois, reçut l'ordre de Don François d'Alveda, dernier gouverneur du comté de Bourgogne pour le compte du roi d'Espagne, de mettre hors de défense le château de Courlaoux et de renforcer ceux de Montaigu et de Saint-Laurent-la-Roche, plus faciles à défendre. Cet ordre convint à Lacuzon, car le propriétaire du château de Courlaoux était alors Ferdinand de la Baume, comte de Montrevel, qui commandait des troupes françaises en Bresse. Le château ne fut complètement rasé qu'après la Révolution. On retrouve encore aujourd'hui dans les murs de certaines maisons du village des pierres anciennes en provenant.

La guerre de Cent ans prit fin au début du XVe siècle. Duc de Bourgogne depuis 1419, Philippe le Bon, fils de Jean sans Peur, se fit remarquer pour ses goûts chevaleresques. C'est lui qui institua le grand ordre de la Toison d'or. La magnificence de sa cour rivalisait avec celle du roi de France, Charles VII, et allait même jusqu'à la dépasser.

En 1443, à l'occasion du mariage de Jean de Chalon, fils du prince d'Orange, le comte de Charny organisa à Dijon les plus belles joutes que l'on ait vues depuis longtemps. Ce tournoi fut honoré par la présence des ducs de Savoie et de Bourgogne. Guillaume de Vaudrey y parut et lutta avec avantage contre plusieurs chevaliers renommés pour leur adresse.

En 1467, Charles le Téméraire succéda à son père, Philippe le Bon, mais sa politique guerrière fut un désastre pour la Bourgogne. Guillaume de Vaudrey, chambellan du Duc, participa à ses nombreuses campagnes. A la mort du Téméraire, tué au siège de Nancy en 1477, sa fille, Marie de Bourgogne, lui succéda. Mais le roi de France, Louis XI, revendiqua la Bourgogne au nom de la loi salique et ses troupes envahirent les deux provinces.

Les Vaudrey, comme beaucoup de Comtois, restèrent fidèles à la princesse. Guillaume et son frère Claude conduisirent héroïquement la défense de Vesoul, mais les armées du roi de France remportèrent la victoire. Guillaume y fut fait prisonnier et exécuté en 1479. La Bourgogne fut alors conquise. Par le traité d'Amiens, en 1482, la Franche Comté et l'Artois furent rendus à Marie de Bourgogne qui avait, entre temps, épousé Maximilien d'Autriche. Ce même traité arrêtait le mariage du dauphin Charles, fils de Louis XI, avec Marguerite, leur fille. Mais Louis XI fit rompre les fiançailles et la Franche-Comté resta sous la domination de la puissante Maison d'Autriche, les Francs-Comtois devenant sujets du Saint Empire romain germanique, Autrichiens avant de devenir Espagnols puis Français.

Guillaume de Vaudrey avait une nombreuse descendance, douze fils, tous de valeureux chevaliers. Le coup de lance des Vaudrey était célèbre au XVe siècle. Claude de Vaudrey, l'un d'eux, surnommé « le Fol » à cause de sa bravoure et de sa témérité, devait être un géant, au vu de la taille de son armure de combat. Celle-ci, réalisée en lames de fer et cuir, fut fabriquée vers 1482 dans un atelier de Milan. Elle est conservée à Vienne en Autriche. C'est par le répertoire d'un inventaire d'Innsbrück de 1555 que l'on connaît ces détails.

Un autre fils, Louis de Vaudrey, au cours d'une expédition préparée par l'empereur Maximilien en 1507, s'empara du château de Joux, en devint le châtelain, contrôlant ainsi la route du sel vers la Suisse.

Le nom des Vaudrey est mentionné dans la grande histoire de France, aux côtés de ceux de Duguesclin, Bayard et autres, mais certes non comme compagnons car les Vaudrey étaient de farouches bourguignons. On raconte que, à l'occasion d'un tournoi à Lyon, le jeune Bayard, alors âgé de dix-huit ans, avait osé se mesurer avec le redoutable Claude de Vaudrey, encore dans la force de l'âge et dont le fameux coup de lance pardonnait rarement. Emu par le courage et la gentillesse du futur chevalier "sans peur et sans reproche", Claude de Vaudrey n'abusa pas de sa supériorité et le jeune Bayard sortit honorablement de la rencontre.

Très attachés à leur Duc, les Vaudrey furent souvent conseillers, gouverneurs généraux, et Guillaume fut même grand chambellan, comme on l'a vu. Ils incarnèrent la résistance bourguignonne et franc-comtoise, luttant farouchement contre les rois de France, pour conserver leur indépendance.

 André Gaulliard